Thérèse Chabot a lancé Majestueuse fragilité, un recueil des moments significatifs et des changements importants qui se sont opérés au cours de ses 30 années de carrière à l’occasion d’une exposition en cours à la Maison de la culture de Côte-des-Neiges.
Produite par Expression, cette publication couronne ses 30 ans de travail dans les arts visuels, une bonne partie réalisée pendant 25 ans d’enseignement en céramique à l’Université Concordia.
Dans l’exposition en cours, «Cérémonies pour habiller l’ordinaire», l’artiste multidisciplinaire touche aux événements banals du quotidien qui passent souvent inaperçus dans la nature.
Depuis toujours résidente de Saint-Jean-Baptiste, cette amoureuse de la campagne puise ses matériaux dans un laboratoire vivant, les transforme en objets rituels dans des installations créées en galeries ou dans des lieux sacrés, souvent accompagnées de performances lors des vernissages.
«Je viens de la campagne et on est souvent influencés par ce qu’on voit. Ma mère et ma grand-mère avaient un jardin. Mon frère est horticulteur. J’ai décidé de faire mon propre matériel comme Monet l’a fait, comme Renoir l’a fait pour peindre. Moi, j’utilise des fleurs dans mes installations», a-t-elle dit en entrevue à la Maison de la culture.
Elle cultive les fleurs dans son jardin, les récolte et les fait sécher dans une grange. Quand elle veut faire une installation, elle emmène une centaine de boîtes de fleurs. «Il me faut 10 jours pour couvrir l’espace. Je suis très souple. Je fais des gestes comme ça», fait-elle comme si elle déposait délicatement des pétales sur le sol. «C’est quelque chose que j’ai toujours fait. C’est bon pour la méditation parce quand on fait ça, c’est dans le silence», dit-elle.
D’après elle, son art évoque les travaux manuels des femmes en broderie, en tricot. «Mon point de vue est féministe. Ce qu’il faut comprendre, c’est que mon travail vient des tripes, et que c’est poétique», dit-elle.
Les performances arrivent à 54 ans, très tardivement dans sa vie, selon elle. «Parce que je me posais des questions. Qu’est-ce que j’ai fait de ma vie?»
Comme elle trouve la vie «un peu dure», et elle-même, un peu fragile, elle laisse l’humour entrer dans le portrait. Une nuit, lors d’une cérémonie, elle s’immerge dans un lac dans son habit de reine, coiffée d’une couronne qu’un étudiant avait fait pour elle en 1999, quand elle était étudiante en céramique en Louisiane. «Elle était faite de plâtre et d’allumettes tout autour, comme un diadème. Je l’ai gardée pendant 30 ans, et quand la ménopause a frappé, j’ai commencé à jouer sur le thème «C’est dur d’être une reine». Un jour, je me suis dit, je vais allumer les allumettes. Je l’ai mise et je me suis avancée dans le lac», raconte-t-elle.
Une autre fois, elle interprète un poème de Paul Verlaine sur une musique de style grégorien.
Son art se veut toujours un peu sacrilège, souligne-t-elle.
Dans le monde, les femmes ont été moins mises en valeur que les hommes. Et avec ma taille, je n’ai jamais eu le profil d’une reine. Il y a beaucoup d’injustices à régler, mais moi, quand je fais ça, j’ai l’impression que je fais ma contribution au monde», dit-elle.
L’exposition Cérémonies pour habiller l’ordinaire de Thérèse Chabot sera présentée jusqu’au 3 mars à la Maison de la culture de Côte-des-Neiges.
