Gabriel Bazin a longtemps milité dans le domaine des droits humains contre la brutalité policière et le profilage racial à la Ligue des Noirs du Québec aux côtés de Dan Philip. L’ancien président a démissionné et M. Bazin, élu à l’unanimité le 17 avril dernier, prend le relais après avoir été vice-président pendant un an.
M. Bazin veut continuer dans la même veine que son successeur : mener un combat contre les abus policiers et lutter contre toute forme d’injustice. «Je pense à la discrimination, à l’exclusion à l’emploi. Quand je pense à la discrimination dans les écoles, je pense à la formation des gangs de rue. Ça m’intéresse au plus haut point», dit-il.
Juriste militant, il a pratiqué le droit de 1989 à 1997. Son intérêt pour la justice et les droits et libertés prend source dans la famille. «Mon père a pratiqué le droit. J’ai une sœur juriste qui détient un baccalauréat en Sciences juridiques de l’UQÀM et qui a fait carrière d’infirmière et de représentante syndicale à Montréal», confie-t-il.
Gabriel Bazin parle avec une habileté d’orateur, détendu, le regard à la fois doux et perçant. «Moi personnellement, je ne me laisserai pas intimider par qui que ce soit. Je serais tenté de dire que je suis moins pondéré, moins sage que M. Philip. Moins diplomate que lui», dit-il en balayant son autodérision d’un franc sourire.
Sous sa présidence, la Ligue continuera d’exercer un rôle de vigilance et de protection des droits des minorités visibles. «Ici, il n’y a pas de gangs de rue, mais des présomptions. Une fois, j’étais avec Dan Philip sur Plamondon. Un policier a abordé un jeune qui sortait d’un restaurant. Il venait de s’acheter un poulet, mais ils l’ont fouillé. Parce qu’il y avait présomption que ce gars va être un criminel. On a donc dit que c’était du profilage racial».
La Ligue des Noirs a certaines réserves sur la création du Bureau des enquêtes indépendantes, bien que ce soit un pas dans la bonne direction. «Nous voulions qu’elle soit civile, vraiment indépendante et sous le parapluie du ministère de la Justice et non pas du ministère de la Sécurité publique», dit-il.
Il a tout de même constaté des avancées sociales au fil des ans. «Je peux penser à la présence d’immigrants à la STM et de quelques membres de minorités visibles dans la police. Il n’y en avait pas. Mais nous voulons des résultats collectifs, non pas individuels», a-t-il précisé.
M. Bazin a été professeur de langues et de littérature française à l’Université Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse pendant six ans. D’origine haïtienne, il a vécu deux ans aux États-Unis avant d’entrer au Canada en 1967.
L’une des actions les plus concrètes qu’il mène actuellement est la lutte contre le décrochage scolaire. «Dans la communauté noire, les parents sont très sévères avec leurs enfants. Parfois il y a des enfants qui ne disent pas à leurs parents qu’ils ont été renvoyés de l’école. Des fois ils trainent deux, trois jours dans la rue, et puis ils s’intègrent dans les gangs de rue. Nous voulons être un lien entre la famille et l’école pour lutter contre le décrochage scolaire. Ça, c’est l’une de nos préoccupations les plus immédiates», dit-il.