Le maire Lionel Perez a affirmé à la séance du conseil de CDN-NDG, le 6 mai dernier, que l’arrondissement travaille activement à l’élaboration d’un plan stratégique pour mieux lutter contre l’insalubrité des logements et a promis qu’une annonce serait faite prochainement.
Trois membres de groupes participant à la table sur le logement ont posé tout à tour leur question sous le regard de partisans qui tenaient des pancartes à bout de bras. Leur intervention visait à «aider l’arrondissement dans la préparation de son prochain budget».
Les trois citoyennes ont demandé «davantage de ressources et d’argent dans le service des permis et inspections pour lui permettre d’exercer pleinement ses pouvoirs coercitifs dans l’application du règlement sur l’insalubrité et l’entretien de la sécurité des logements, et ce, sur plusieurs années.»
Lionel Perez dit avoir été proactif dans ce dossier depuis novembre dernier. «On travaille à développer un plan un peu plus stratégique, où participent certains groupes présents ce soir. […] On comprend un peu mal cette sortie […] On ne va pas le faire à la pièce. On a d’autres intervenants desquels on attend des réponses et bientôt j’espère pouvoir l’annoncer», a-t-il répondu.
«Le problème est très grand», lui a expliqué Bernadette Thibodeau, infirmière à La Maison Bleue.
Elle voit des gens se présenter tous les jours à la clinique pour des problèmes de santé liés à la moisissure, comme l’asthme et les infections. Pour les punaises de lit, le processus que doivent suivre les locataires présente «énormément de délais» jusqu’à l’arrivée de l’exterminateur. Difficile de faire le suivi des dossiers à Côte-des-Neiges, surtout pour les gens qui s’expriment difficilement en français ou en anglais et qui ne connaissent ni la loi ni le fonctionnement.
«Je travaille régulièrement avec l’inspecteur. Il fait ce qu’il peut, mais il y a vraiment trop, trop de demandes», a déclaré cette infirmière.
Mme Thibodeau a parlé de la décrépitude du parc de logements locatifs. «Je pourrais appeler la CSST pour ma propre sécurité lorsque je fais des visites à domicile pour vous dire à quel point ils sont dans un état désastreux», a-t-elle lancé tout en reconnaissant les efforts déployés depuis quelque temps.
«On veut, quand quelqu’un dépose une plainte, que l’inspecteur puisse faire le suivi. Qu’il n’attende pas que le locataire avise qu’il n’y a pas eu d’extermination.» Mieux: qu’il aille carrément au-devant, a-t-elle dit.
Lionel Perez a mentionné que plusieurs actions concrètes déjà menées portent leurs fruits depuis la modification du règlement. Depuis février 2012, toute visite subséquente d’un inspecteur est tarifée suivant le principe d’utilisateur payeur, et les interventions sont beaucoup plus rapides.
Le bilan : plus de 2000 inspections la première année, plus de 700 interventions dont plus de 500 traitées favorablement «avec pour plus de 125 des plaintes, des contraventions», 215 dossiers remis au procureur pour non-conformité ainsi que des interventions préventives ciblées dans 53 immeubles.
«Ce n’est pas seulement une question […] d’augmenter le budget et tout le problème va être réglé», a-t-il modéré. L’arrondissement «a un important rôle à jouer, mais c’est à la Direction de santé publique de déclarer un logement insalubre. C’est aux procureurs de poursuivre les contrevenants. C’est à la Régie du logement que les résidents peuvent exercer leurs droits ».
Malgré deux ou trois participations à la table du logement par année, Claire Abraham de Projet Genèse ignorait tout des démarches faites par le maire Perez ces derniers mois. L’équipe aurait visité 1300 locataires entre 2011 et 2012, et constaté que la situation n’a guère changé. Citant le rapport du Vérificateur général de 2011, elle a fait valoir que la détérioration accrue des logements exige impérativement
une solution. Le rapport mentionnait que «chaque arrondissement se dote d’un plan de mise en application du règlement sur son territoire et qu’il devait prévoir une stratégie d’intervention préventive en plus des dispositions liées aux plaintes reçues».
Denise Belec, coordonnatrice de l’OEIL (Organisation d’éducation et d’information logement) de Côte-des-Neiges, a souligné l’échec de la méthode actuelle. Les problèmes n’ont pas été corrigés dans quatre des pires immeubles auxquels l’organisme s’est intéressé en 2010. «Trois ans plus tard, les problèmes n’ont pas été corrigés. Nous constatons qu’aucun constat d’infraction n’a été émis […] La Ville a toujours privilégié l’approche conciliatrice avec les propriétaires. On nous dit que c’est par manque de ressources adéquates».
«Des rapports de la santé publique ont aussi fait état du fait que les toits coulaient et qu’il y avait des problèmes dans la structure de l’immeuble car l’enveloppe n’était pas étanche. Plusieurs locataires ont dû être déménagés à cause des problèmes de santé liés à l’état du logement. D’autres ont simplement quitté de leurs propres moyens», a-t-elle souligné.
Marie Cicchini | redaction@lesactualites.ca
Photo : Marie Cicchini