L’Oratoire Saint-Joseph doit relever de grands défis: comment conserver le grand nombre d’œuvres et d’objets qui s’accumulent depuis plus d’un siècle dans ses réserves, témoins du passé et de l’histoire des congrégations religieuses.
À l’origine, les religieuses de Sainte-Croix n’avaient pas de vocation de collectionner des objets, a expliqué la conservatrice du Musée de l’oratoire, Chantal Turbide. Il y a tout un patrimoine religieux qui s’accumule dans les réserves depuis plus de 100 ans, remontant jusqu’à la fondation de la chapelle de Sainte-Croix, en 1904.
Il s’agit d’un patrimoine mobilier lié au lieu de culte ainsi que d’objets de décoration qui sont soit encore utilisés, soit entreposés au cas où ils serviraient un jour. Certains objets viennent de la chapelle qui fut transformée, et d'autres viennent de gens qui font des dons d’objets de dévotion populaire et de collections après le décès d’une personne dévote, très attachée au frère André et à l’Oratoire.
Ainsi quand le musée a été créé, en 1955, le patrimoine avait déjà beaucoup d’objets de Saint-Joseph en sculpture, en plâtre, en pierre, en bois ou en tableau, comme celui qui fut donné en cadeau à l’ouverture de la crypte en 1917. Quelques objets furent mis en exposition.
Le patrimoine a continué à s’accumuler et à se diversifier au cours des années. En 1973, l’Oratoire a inventorié les objets qu’il possédait dans le cadre d’un mouvement national qui tentait de faire l’inventaire des musées. À la fin des années 1970 et le début des années 1980, le père Bergeron a constitué une collection de crèches d’autour du monde, qu’il a exposée. C’est ainsi qu’est apparue l’intention de collectionner une série d’objets dans un thème. Il y a maintenant 1000 crèches du monde en réserve.
Le musée ne prend pas tout ce qu’on lui propose, affirme la conservatrice. Les grands axes de sa collection sont toujours Saint-Joseph et tout ce qui concerne l’Oratoire, la Sainte Famille, les crèches et le frère André. De plus, l’Oratoire a eu beaucoup de prêtres qui ont utilisé divers objets. Les objets de rite des pères de Sainte-Croix qui sont décédés font partie des dons. Les ciboires pour distribuer les hosties ne sont pas petits comme ceux d’une église paroissiale. «Il y a eu des époques comme à Noël, où il y avait énormément de monde dans les messes, car c’est une énorme basilique», explique la conservatrice.
«Mais qui dit amasser des objets dit responsabilité que l’institution assume. C’est tout un défi pour une institution comme l’Oratoire », avoue Mme Turbide. Pour cela, il manque les bonnes conditions, bref tout ce qu’un musée doit surveiller: de l’espace aménagé, climatisé et sécurité. «Les objets de peu de valeur ou d’intérêt pour nous ont parfois beaucoup de valeur symbolique, sentimentale, patrimoniale ou artistique. On a aussi des œuvres d’art faites par divers artistes», explique-t-elle.
Les gens qui font des dons souhaitent souvent que les objets soient mis en valeur et exposés pour expliquer leur utilité, leur utilisation et dans quel contexte.
Le Musée de l’oratoire a quelques employés à temps plein qui aident à monter des expositions avec l’aide des ressources humaines et matérielles à l’interne. Quant au travail de conservation, il relève d’une petite équipe de professionnels, qui est fort sollicitée par l’immensité de la tâche. La conservation du patrimoine religieux demande des connaissances sur les objets.
Il y a donc la période de déchristianisation de la société québécoise qui est à l’origine de ces dons. Depuis les années 1970, il y a des communautés religieuses qui ont fermé et qui ont vendu leur patrimoine mobilier et leurs objets, comme le font les églises. Mais il reste encore des congrégations religieuses du Québec qui sont vieillissantes. «Qu’arrive-t-il aux objets qui meublaient ces maisons-là, qui rappellent l’histoire de ces communautés-là et de leur vocation? Il ne faut pas oublier que ces communautés religieuses étaient des communautés enseignantes. Elles s’occupaient des hôpitaux, des pauvres, des malades mentaux. L’intérêt de conserver ce patrimoine, c’est de rappeler d’où on vient, c’est un pan de notre histoire», conclut Chantal Turbide.